Appel à contributions « Humoresques »


La revue « Humoresques » lance un appel à contributions sur le thème « Spectacles grotesques » pour son numéro 31 du printemps 2010.

Appel à contribution, Humoresques n° 31, printemps 2010

« Spectacles grotesques »

Le grotesque est un phénomène qui se joue des frontières. Bien repéré dans les arts, en peinture, en littérature, au cinéma, il semble ne pas devoir s’y réduire puisqu’il peut surgir en réalité à l’occasion de n’importe quel « spectacle », donné volontairement ou involontairement, dès lors que celui-ci produit une certaine désorientation du public en prenant à rebours les habitudes (de lecture, de comportement, attentes sociales, morales…). Il est alors senti comme relevant d’une ambiguïté constitutive qui conduit à hésiter sur son interprétation, faisant de celui-ci un phénomène à la fois comique et inquiétant.

En se gardant bien de réduire cette ambiguïté mais afin de le différencier d’autres formes de comique qui paraissent proches mais dont il convient pourtant de le distinguer (humour noir, absurde, satire, parodie notamment), on pourra définir l’effet grotesque comme un vertige qui s’empare du récepteur et le déstabilise – au moins provisoirement – par l’intrusion d’éléments (images, codes linguistiques, éléments habituellement antagonistes et exclusifs les uns des autres, etc.) qui perturbent sa perception normale et les conditions habituelles du sens. C’est dire que, si l’art et la littérature sont des lieux d’expression privilégiés du grotesque, rien n’interdit de chercher également la source de celui-ci dans des manifestations « culturelles » au sens large (rites d’initiations, fêtes et notamment carnaval, célébrations diverses : naissances, mariages, enterrements, cérémonies officielles, exhibitions du pouvoir, etc.) à partir du moment où sont mis en scène, proposés en spectacle, des phénomènes capables de produire cette désorientation temporaire du public, cette suspension des codes (en particulier moraux) qui régissent en temps normal l’existence collective. Mais le vertige grotesque, comme Baudelaire en a l’intuition, a aussi pour caractéristique essentielle d’irriguer pour ainsi dire plus énergiquement le cerveau : il fait envisager avec une lucidité supérieure le spectacle en question, découvrir la vraie nature de ses acteurs et surtout peut-être celle du monde où il prend place. Il participe donc d’une « révélation » brutale qui réorganise la perception que l’on se fait du réel.

On s’interrogera donc sur le type de « spectacle » capable de produire l’effet grotesque, sur les conditions que doit remplir celui-ci pour produire le vertige en question et sur les moyens mis en œuvre pour la production de cet effet en art. Si l’étude et l’analyse des expressions du grotesque dans les différentes formes d’art (roman, théâtre, peinture, sculpture, architecture/décoration, cinéma) est bien sûr attendue, on pourra s’interroger également sur le type de matériau dont celles-ci s’emparent (masques, travestissements, gestes et attitudes, lieux et actions particuliers, etc.) et sur le passage éventuel du réel à l’art. On pourra également s’intéresser à l’évolution des formes de spectacles au cours du temps, chercher quels sont les moteurs anciens et nouveaux capables de produire le vertige (les nouveaux médias, les nouvelles formes d’art comme le cinéma ont-ils changé la nature du vertige ?). On pourra également se demander par exemple de quels types de révélations les spectacles grotesques se font les truchements : quelles sphères particulières de l’existence humaines sont les cibles privilégiées de ce « vertige moral » engendré par le grotesque ?

Les propositions d’articles, accompagnées d’un titre, d’un résumé et d’une brève présentation de l’auteur, sont à adresser Rémi Astruc (remi.astruc@orange.fr, 84, av. Marcelle, 78740 Vaux-sur-Seine) pour le 1er juin 2009. Les articles retenus devront nous parvenir avant le 15 novembre 2009 afin de permettre la publication au printemps 2010 .