Appel à contributions – « Ridiculosa »


« CARICATURE ET LITTERATURE » Ridiculosa 16
Après plusieurs numéros consacrés aux relations entre la caricature
et la peinture, la publicité, la sculpture et la modernité, la revue « Ridiculosa » prépare pour son seizième numéro un nouvel ouvrage « Caricature et littérature ».

Caricature de Baudelaire par Champfleury

 

Argumentaire écrit par Alain Deligne

Notre intérêt se portera sur le dialogue créateur entre caricature en images et littérature, deux modes d’expression qui sont aussi deux modes de recherche dans le processus de création. On les envisagera ici principalement sous deux aspects : celui de la caricature inspirée par la littérature et celui de la synthèse des deux incarnée par un seul et même artiste.

Pour illustrer la première forme, qu’il suffise d’abord de constater la présence de nombreuses citations littéraires chez certains caricaturistes ou dans les légendes ajoutées par la rédaction des Fliegende Blätter ou du Kladderadatsch. Mais on évoquera aussi Daumier nous installant aux premières loges d’un théâtre. Et avec Cagnat, on découvrira des sociétés holmésiennes du monde entier (It is always a joy, 2001). Dans Retour à Montecristo (2002) du même auteur, nous partagerons les aventures d’E. Dantès, le héros d’A. Dumas. Exercices de stèle (1996), quant à lui, croque sur un texte de P. Delbourg, une centaine d’auteurs célèbres, de Rabelais à Balzac, en passant par Fontenelle et Proust. Mais Masques et plumes (1986) de Wiaz avait déjà fait de même, tous deux s’inscrivant en fait dans la grande tradition des portraits-charge de Levine. Et toujours à titre d’exemple, on mentionnera les Artaud, Michaux, Supervielle, Paulhan, Léautaud, Dhôtel, Jouhandeau et autres, portraiturés et caricaturés par l’écrivain et peintre Jean Dubuffet.

Une citation nous permettra d’aborder le second versant. Un Proust nostalgique de l’art du caricaturiste a pu en effet s’exprimer ainsi à propos de la production littéraire : « Le littérateur envie le peintre, il aimerait prendre des croquis […]. Quand il écrit, il n’est pas un geste de ses personnages, un tic, un accent, qui n’ait été apporté à son inspiration par sa mémoire, pas un nom de personnage inventé sous lequel il ne puisse mettre soixante noms de personnages vus, dont l’un a posé pour la grimace, l’autre pour le monocle, tel pour la colère, tel pour le mouvement avantageux du bras. Et alors l’écrivain se rend compte que si son rêve d’être peintre n’était pas réalisable d’une manière consciente […], il se trouve pourtant avoir été réalisé et que l’écrivain […] a fait son carnet de croquis sans le savoir. » (Le Temps retrouvé). Ou…en le sachant. Car tel est le cas de nombreux écrivains au crayon acerbe comme Musset, Verlaine, Baudelaire, Maupassant, Hugo, Jarry, Cocteau, H. Mann, E.-T. Vischer, Kubin et jusqu’au romancier J.-P. Delhomme, tout récent dessinateur satiriste des coulisses du show médiatique (La chose littéraire, 2007). Il est donc tentant de se pencher sur ce qu’un homme de lettres peut dessiner en marge de ses manuscrits. S’y dévoile en effet l’intimité d’un laboratoire, où les dessins peuvent être intéressants pour eux-mêmes et non seulement comme témoins de la production d’un grand écrivain.

Se situant à l’intersection des deux rubriques précédentes, pourrait aussi être pris en compte le travail des dessinateurs pratiquant des genres mixtes nouveaux comme le roman graphique (Serguei, W. Eisner), l’autobiographie dessinée (Pajak), la compression de romans (C. Poth), l’autobiographie d’un autre que soi (Moi, Léonard de Vinci par R. Steadman) : autant d’ensembles où texte et dessin se mêlent en une narration inédite.

Tous ces rapports seraient abordés dans un esprit désireux de retenir les acquis des différentes disciplines s’intéressant à la caricature (histoire, histoire de l’art, des mentalités, philosophie, esthétique, sémiotique, psychologie, sociologie, anthropologie culturelle, herméneutique, politologie, didactique…) et des multiples philologies (romanistique, germanistique, anglistique…).

Recommandations aux auteurs intéressés :

Merci de nous présenter vos propositions en nous envoyant l’intitulé de l’article ainsi qu’un résumé détaillé de votre projet en dix lignes avant novembre 2008. Les articles devront comporter une dizaine de pages (autour de 20 000 signes et espaces) et devront être remis – au plus tard – fin juin 2009 et accorderont une place importante à l’analyse des images.

Toute proposition d’articles et de textes est à envoyer à :

Alain Deligne : www.uni-muenster.de/Romanistik/dozenten/deligne
Margarethe Potocki : MaPotocki@aol.com
Marie Delépine : mariedelepine@hotmail.fr