La ville de Dax organise du 2 au 5 juin 2011 un festival de la satire inédit et d’une ampleur sans précédent. Interview de Marc Large, dessinateur de presse et directeur artistique du très attendu « Satiradax ».
Qu’est-ce qui distingue Satiradax d’autres événements du même genre qui se multiplient ces derniers temps en France ?
Je ne connais aucun événement qui ressemble à ce festival. C’est le premier festival de la satire. C’est à dire que l’idée est nouvelle de rassembler tous les modes d’expression relatifs à la satire : dessin de presse, spectacles, concerts, conférences, expositions, dédicaces, théâtre de rue, cinéma, one man show, etc… La volonté est de décloisonner nos activités et les rassembler dans une grande fête. L’évènement qui m’a inspiré ce festival était celui de Quend consacré au cinéma Grolandais. Il s’agissait d’une excellente parodie du festival de Cannes et c’était le cinéma qui y était à l’honneur
Humoristes, concerts, projections de film… le dessin de presse et la caricature ne risquent-ils pas de disparaître dans tout ça ?
Non, ce sont les dessinateurs qui sont les plus nombreux sur ce festival : une vingtaine. Le dessin de presse et la caricature seront à l’honneur au travers de conférences, de débats, d’expositions et de dédicaces. Nous aurons une conférence de G. Doizy, le vendredi, sur « Dessin de presse et internet », une autre le samedi sur la « Liberté de la presse et la censure » avec deux temps forts menés par F. Forcadell, G. Doizy, J. Houdré et S. Mazurier. Et un dernier débat de F. Forcadell le dimanche consacré exclusivement au dessin. Quatre principales expositions seront dédiées à « Bêtes de pouvoir », à « La liberté de la presse et la censure », à « Faizant » et à « Faujour ». Dans d’autres lieux de la ville, nous aurons des expositions dédiées au journal Kamikaze, au « Professeur Choron », à « La femme fontaine » de Liebig, au mensuel Zélium, etc. Le dessinateur Vuillemin sera là pour présenter avec E. Martin et P. Carles le film « Choron dernière ». Et Stéphane Mercurio ouvrira le festival avec le film de Siné : « Mourir ? Plutôt crever ». On fait donc la part belle au dessin de presse, non
Le festival aligne quelques stars nationales de l’humour comme Didier Porte, Alévèque, Groland, des dessinateurs de Siné Hebdo. Des artistes plutôt classés à gauche, comme la mairie de Dax d’ailleurs. C’est un festival militant ou de l’auto-censure ?
Je crois qu’on verra plus d’anarchistes, de déçus de la politique, d’électrons libres non étiquetables, que de gauchistes! Dans les invités, il n’y a pas un seul « homme sandwich » d’un parti politique ! Si à droite, vous trouvez des gens vraiment drôles, je suis preneur. Mais je doute que les blagues d’Hortefeux ou de Bigard aient toute leur place dans ce festival. Pour les concerts, on a préféré Carlita de Groland à la vraie Carla…
L’Etat et les pouvoirs locaux ou régionaux se montrent de plus en plus chiches envers les manifestations culturelles. Comment est né le projet et surtout qu’est-ce qui rend sa réalisation possible aujourd’hui ?
Je travaille chaque jour sur ce projet depuis presque deux ans. Son financement était impossible sans les pouvoirs locaux. J’ai la chance qu’entre la Ville, le département et la région les choses se passent bien. Ils ont tout de suite répondu présents, malgré l’aspect subversif d’une telle manifestation. Le festival est réalisable essentiellement grâce aux invités. Tous ont joué le jeu en venant bénévolement ou (pour les artistes se produisant sur scène) en proposant des cachets bien moindres que ceux qu’ils pratiquent en temps normal. Les invités ont surtout défendu le plaisir de se retrouver ensemble dans cette fête. Les cafés, bars, brasseries et commerces de la Ville aussi ont très vite répondu présents en s’investissant dans la programmation. Personne ne défend ce festival pour de l’argent.
Je n’ai pas vu de dessinatrices de presse dans la programmation…
Il y aura beaucoup de femmes, même si bizarrement elles sont moins nombreuses dans le dessin de presse. Carlita, Sandra Dra de Groland, Zazon, Giedré, les Pussydelic, Rikkha, Juliette Dragon et les filles de joie, Miss Ming, Stéphane Mercurio, Maud Sinet et d’autres seront à l’honneur. Je n’ai pas non plus voulu tomber dans l’hypocrisie des quotas en m’imposant d’inviter autant d’hommes que de femmes. Je ne me suis pas posé de question à ce niveau là. Mon seul soucis était d’inviter des artistes qui s’entendent bien entre eux et que ce plaisir soit palpable par le public.
Mon autre souci concernant le festival était de ne pas faire quelque-chose d’élitiste. Je voulais un maximum de gratuité. Que le public puisse croiser les invités dans les rues et les bars. Qu’il y ait une vraie proximité. Un chapiteau sera monté pour les spectacles et certains concerts. En terme de sécurité nous ne pouvions pas l’ouvrir gratuitement à la foule sans délimitation. Du coup, nous avons un tarif unique de 10 euros pour voir deux ou trois groupes d’affilé ! Les concerts du off seront tous gratuits. Les conférences, débats, expos et accès aux dédicaces également. L’entrée pour les films et sketches au cinéma seront de 5,5 e. Pour un pass global de 66 euros, on peut voir Porte, Alévêque, Didier Super, Giedré, les Wampas et une douzaine d’autres groupes. Et il y aura de nombreuses surprises gratuites dans les rues de la ville !
Marc Large (voir son site ou son blog)
Le site de SATIRADAX
Propos recueillis par G. Doizy le 11 avril 2011
Photo en tête d’interview tirée de l’article que consacre Le Point à Marc Large et Satiradax dans son édition du 31 mars 2011