Ridiculosa 24: Appel à contribution


Appel à contribution pour le numéro 24 de Ridiculosa
L’occupation de l’espace public par la satire graphique
Date limite de réponse: 30 juin 2016

 Argumentaire en français, puis en anglais

 

L’occupation de l’espace public par la satire graphique

Dans son livre L’Esthétique des villes, de 1908, Émile Magne écrit : « Une rue, si belle soit-elle, ne manifeste pas d’existence par la seule vertu de son architecture. Organisme inerte, elle a besoin d’être habitée et parcourue pour acquérir une âme. Dès lors, reflet d’humanité, elle adopte, dans la collectivité urbaine, l’attitude que lui communiquent ses habitants et passants »[1]. Dans sa perception, donc, les personnes, leurs objets et leurs pratiques culturelles sont la véritable âme de la rue. Cette idée revient un siècle plus tard, en 2010, dans l’article Street Art, Sweet Art ? Reclaiming the « Public » in Public Place, où l’on peut lire : « The city is not only made up of people, of buildings, but of relationships between people and buildings, between people and walls, between the eyes of the people and our poetry »[2]. Le premier texte fait référence aux activités commerciales qui font que les hommes se croisent dans l’espace public, alors que le deuxième traite spécifiquement du street art comme forme d’expression artistique.

Ces deux situations ont comme point commun ce que Luca Visconti et alii ont appelé l’inévitabilité de l’espace public, c’est-à-dire, le fait que nous ne pouvons pas nous dévier des images qui nous y sont proposées. C’est précisément la quête d’un plus large public qui fait, dans les années 1960, que l’art quitte les galeries pour gagner les rues. Si l’art urbain est à l’origine de nos questionnements sur l’occupation de l’espace public par la satire graphique, nous aimerions proposer un élargissement temporel et thématique qui apporte plus de profondeur historique à cette réflexion. Ainsi, nous avons identifié trois thématiques dans lesquelles les auteurs pourraient s’engager, ce qui n’empêche en rien que ces aspects se confondent au sein d’un même article :

1. La rue, support physique à la production satirique

            Nous nous intéressons ici à la rue en tant que support physique à la satire graphique et donc du point de vue de la production. Ses murs, ses pavés, ses postes d’illumination, ses bancs deviennent des lieux d’expression satirique, comme c’est le cas du street art ou de manifestations à caractère plus officiel, tels les œuvres d’art sur la quatrième colonne de Trafalgar Square, les espaces publicitaires (affiches, colonne Morris), les vitrines ou les kiosques à journaux.

2. Satiriser dans la rue : création et rassemblement

            Dans un registre où l’éphémère se fait encore plus sentir, la rue s’ouvre aux manifestations et à leurs pancartes. Luca Visconti et alii proposent le remplacement du mot space pour celui de place, dont le sens en français (le mot place) se résume bien dans le mot « space » tel qu’utilisé par Visconti et alii. La place est ici lieu par excellence du rassemblement et, donc, occupée par une population qui lui attribue un sens. Pensons autant au carnaval de Rio de Janeiro, dès le XIXe siècle, qu’au Printemps érable québécois en 2012, les deux ayant produit grand nombre d’images satiriques.

3. Lieu de passage vers un patrimoine satirique

            En inversant légèrement la logique, nous nous intéressons au regard des spectateurs passants et de la réception : comprendre la rue comme un lieu de passage où, pendant nos trajets, notre regard est attiré malgré nous vers de nombreuses images satiriques, créant donc de nouvelles formes de consommation des images satiriques ou d’humour. Quelles relations entretiennent alors les habitants urbains avec ces manifestations visuelles ? Encore pouvons-nous réfléchir à ces innombrables surfaces couvertes d’interventions graphiques non-autorisées, furtives et éphémères et qui peuvent éventuellement être reconstituées en tant que traces documentées, peu ou prou, dans une archive (matérielle ou non, parfois bien involontaire et souvent tout aussi chancelante).

Les propositions de contribution de 3 000 signes maximum, suivies d’une courte notice biographique sont à envoyer avant le 30 juin 2016 à Dominic Hardy (hardy.dominic@uqam.ca) et Aline dell’Orto (aline-dellorto@live.com). La liste des propositions retenues sera communiquée mi-septembre, la remise des articles est fixée au 15 février 2017.



1. Émile MAGNE, L’Esthétique des villes, Paris, Infolio Éditions, 2012 [1908]. p. 69.

2. Luca M. VISCONTI; John F. SHERRY; Stefania BORGHINI; Laurel ANDERSON, que n pouvons pas nous dévier de kiosques de jounal en sont algru XIXe sit et qui donc pcularmente o Rio de Janeiro, no da obra « Sreet Art, Sweet Art? Reclaiming the “Public” in Public Place », Journal of Consumer Research, vol. 37, Octobre 2010. p. 520. Traduction : « La ville n’est pas faite exclusivement de personnes, de bâtiments, mais de relations entre personnes et bâtiments, entre personnes et murs, entre les yeux des personnes et notre poésie. »

 

 

 

 

Occupy: Public Space and Graphic Satire

 

In his 1908 book L’Esthétique des villes, Émile Magne writes: “A street, no matter how beautiful it may be, doesn’t make its existence manifest simply by virtue of its architecture. As an inert organism, it needs to be inhabited and criss-crossed if it is to acquire a soul. Then, as a reflection of humanity, it adopts within the human collectivity the attitude conferred by its inhabitants and passers-by.” [1] As Magne sees it, this “soul of the street” is constituted by people, their objects and their cultural practices. This idea returns a century later, in 2010, when Luca Visconti and his collaborators pen the article Street Art, Sweet Art? Reclaiming the “Public” in Public Place: “The city is not only made up of people, of buildings, but of relationships between people and buildings, between people and walls, between the eyes of the people and our poetry.” [2] Whereas Magne refers to the commercial activities that bring people together in the public space, Visconti et al. are specifically concerned street art as a form of artistic expression.

 

These two situations share what these writers call the inevitability of public space, that is, the fact that we cannot avoid the images with which public space is invested. By the same token, the quest for a larger audience led artists in the 1960s to leave behind gallery spaces for those of the streets. If urban art is at the core of our investigation of the ways in which public space has been occupied and transformed graphic satire, we also propose a wider temporal and thematic framework in order to place this enquiry into a broader historical structure. We identify three strands as starting points for proposals that may equally well cross aspects of each:

 

1/The street as physical surface for satirical production

 

Here, we are concerned with the street as a surface for graphic satire and the point of view of production. Walls, pavements, streetlamps, benches are so many sites for satirical expression, as are billboards, vitrines or newspaper-stands, or indeed an official project such as Trafalgar Square’s Fourth Plinth.

 

2/Satirizing in the Street: Creation and popular gathering

 

The street is also seen as a site for ephemeral expressions, for demonstrations and protest signs. Luca Visconti et al. suggest that we replace the word space by place, a word whose French homonym place offers thought-provoking echoes (place, a public square; place, a position in a hierarchical sequence). This polysemic place is the site par excellence for public gatherings; it is occupied by a population that gives it its meaning. Here we can think of large-scale gatherings that are the occasion for the production of satirical imagery, from the nineteenth century (the carnival of Rio de Janeiro, for example) right through to the present (Québec’s 2012 Maple Spring/Printemps érable movement).

 

3/Transitioning towards a satirical heritage

 

By slightly inverting this logic, we are also interested in the gaze of the spectator and in the reception of this satirical imagery. Here, the street is understood as a site of transition; despite ourselves, we are caught up in a wide range of satirical and humorous images, so that new forms of consumption are created. What relationships are established between urban dwellers and these visual manifestations? How are we to make sense of the countless surfaces that are covered with unauthorized graphic interventions, furtive and ephemeral—which can eventually become reconstituted as documentary (and documented) traces in an Archive that might be material (or not), or that might be involuntary or indeed unstable?

 

Proposals, not exceeding 500 words and accompanied by a short biographical notice should be sent by June 30, 2016, to Aline dell’Orto (aline-dellorto@live.com) and Dominic Hardy (hardy.dominic@uqam.ca). The list of accepted proposals will be established in mid-September, with final texts to follow by February 15, 2017.

 


 

Émile MAGNE, L’Esthétique des villes, Paris, Infolio Éditions, 2012 [1908]. p. 69.

Luca M. VISCONTI; John F. SHERRY; Stefania BORGHINI; Laurel ANDERSON, que n pouvons pas nous dévier de kiosques de jounal en sont algru XIXe sit et qui donc pcularmente o Rio de Janeiro, no da obra « Sreet Art, Sweet Art? Reclaiming the “Public” in Public Place », Journal of Consumer Research, vol. 37, Octobre 2010. p. 520.