Siné fait son ciné


Mourir ? Plutôt crever ! Un film de Stéphane Mercurio avec le dessinateur Siné. Coffret comprenant un DVD (film de 95 mn) et un CD (musiques du film) : 18 euros.

Peu de films ont été réalisés ces dernières années sur des dessinateurs de presse. Philippe Val, en licenciant Siné de Charlie Hebdo à propos d’une chronique jugée «antisémite (pas par la justice), sort de l’oubli le trublion à l’heure d’une retraite pourtant méritée.

En paraissant quelques semaines plus tard, Siné Hebdo, suffisamment bien accueilli par les lecteurs pour durer presque deux ans, offre une nouvelle notoriété et une nouvelle tribune à Siné, que l’on peut considérer comme un des dessinateurs plus radicaux de la seconde moitié du XXe siècle en France.

Le film de Stéphane Mercurio se fait bien sûr l’écho de la crise Val/Siné, prétexte à évoquer quelques épisodes saillants de la riche vie du dessinateur enragé. Alternant interviews, scènes de vie quotidienne dans la maison du dessinateur et sélection de dessins (fixes ou animés) parus pour certains dans la presse, le long métrage édité sous forme de DVD, après diffusion dans les salles obscures, intéressera les fans de Siné, et plus généralement les amateurs de dessin satirique. Siné évoque bien sûr ses relations d’amitié avec quelques personnalités connues du monde littéraire et politique (Jacques Prévert et Malcolm X par exemple), sa passion pour le jazz. Il raconte également quelques unes de ses aventures éditoriales les plus fameuses, comme le lancement de Siné Massacre ou de l’Enragé, et bien sûr sa collaboration à l’Express pendant la guerre d’Algérie, son engagement auprès du FLN. Au fil des séquences, le spectateur se régale des saillies libertaires et provocatrices chez ce vieux monsieur bien vert, encore capable de coups de gueule bien sentis.

On retiendra également quelques scènes particulièrement touchantes où le dessinateur ému et émouvant évoque quelques aspects de sa personnalité intime, qui tranchent avec le ton provocateur et cinglant de ses dessins inoubliables. Il faut reconnaître une qualité indéniable à ce caricaturiste inventif : la capacité à s’engager pour des causes minoritaires et à mettre son crayon au service d’idées radicales. Loin du simple commentaire éditorial, ses dessins assènent des coups et forment une propagande ininterrompue où fleure bon la révolte contre les aspects les plus visibles de l’oppression capitaliste. Le film, bien que très intéressant, demeure totalement acquis à Siné. Il relève donc moins du documentaire que de l’hommage, ce qui ne l’empêche pas de traduire avec efficacité différentes facettes de la vie de Siné.

GD

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